Maurice Métral, Légion d`honneur, Grône, 15.10.99

Remise des insignes de la Légion d’honneur à M. Maurice METRAL, écrivain - Grône, 15 octobre 1999 Monsieur le Chevalier de la Légion d’honneur, ... Quelle fierté pour moi que de pouvoir représenter ici le Conseil d’Etat du canton du Valais, à l’occasion de la remise des insignes de la Légion d’honneur à M. Maurice Métral, écrivain valaisan ! En effet, peu d’hommes de lettres suisses ont à ce jour connu le privilège de se voir décerner cette décoration, et c’est une réelle joie que de participer activement à cette cérémonie. La décoration que vous portez désormais, Monsieur Métral, c’est d’abord une marque d’excellence qui consacre votre précieuse contribution à la littérature française. Mais c’est également un signe de la reconnaissance de cette foule d’anonymes lecteurs qui - à travers votre art et par votre ferveur - ont pu faire ces voyages immobiles que la littérature et la musique de qualité autorisent. La recette de son succès, Maurice Métral l’a composée tout simplement : en décrivant le quotidien, sans artifices, mais avec le regard de l’amoureux. L’amoureux pour qui les choses les plus simples peuvent devenir sans prix : l’affection d’une mère, un mélèze rougi par l’automne, le silence de la montagne... « Les écrits sont la descendance de l’âme, comme les enfants celle du corps » disait déjà Clément d’Alexandrie vers l’an 200, à qui répond comme en écho 14 siècles plus tard Cervantès : « La plume est la langue de l’âme ». D’âme, parlons-en. Maurice Métral est Valaisan. D’origine bien sûr, mais surtout de coeur et de fibres : profondément enraciné dans la culture de ce pays, il a été imprégné dès son plus jeune âge des valeurs qui s’y rattachent. Jamais reniées, ces dernières imprègnent d’ailleurs la totalité de son oeuvre, elles ont séduit bon nombre de lecteurs au-delà de nos frontières. Simple et authentique : tels sont les qualificatifs qui caractérisent le mieux - à mon sens - le style de Maurice Métral. Sobre, imagée, totalement dépourvue de formules alambiquées, son écriture est accessible à tous. Ceci explique le succès que remportent ses différentes oeuvres auprès du grand public. Les armoiries de la famille Métral réunissent la hache du charpentier, symbole de force, et l’équerre du menuisier, symbole de précision : précision de l’observation et force de l’évocation sont aussi caractéristiques de l’écriture de Maurice Métral. Aujourd’hui encore, les lecteurs se délectent ainsi de ces récits dont la trame a très souvent le Valais pour décor. En effet, à de rares exceptions près, - dont le premier roman « Le Chemin des larmes » et « La Vallée blanche », les oeuvres de Maurice Métral ont pour cadre les Alpes valaisannes. Omniprésentes dans ses romans, les senteurs d’arolles rappellent l’attachement de l’auteur à son pays natal, et au métier paternel de charpentier. Des professions, Maurice Métral en a exercées plus d’une avant de se consacrer à sa vraie passion, sa réelle vocation : l’écriture. De son expérience de contremaître sur les grands chantiers alpins, il nous laisse un témoignage fort et émouvant : par le biais, - faut-il dire l’intercession ? - du superbe récit « Les Hauts cimetières », il dépeint les conditions de travail difficiles des bâtisseurs de barrages. Comme Blaise Cendrars dans « L’Homme foudroyé », Maurice Métral pourrait prétendre : « Je ne trempe pas ma plume dans un encrier, mais dans la vie. » Le lecteur est alors pris par une histoire profondément humaine dans laquelle on retrouve l’engagement de l’écrivain contre l’égoïsme, l’hypocrisie et l’exploitation de l’homme par l’homme. On entend dire parfois que les Valaisans sont têtus. Plus poliment on prétend qu’ils ont du caractère... Je n’aime pas trop ces affirmations, un peu simplificatrices. Cela dit, il me semble reconnaître en vous un ... vrai Valaisan ! Pour faire vivre votre famille, vous avez pratiqué divers métiers. Au fond de vous, cependant, une seule idée : écrire. Enseignant, puis rédacteur en chef de la « Feuille d’Avis du Valais », Maurice Métral a patienté de longues années avant de pouvoir vivre de la seule écriture : il est à ce jour l’un des rares écrivains romands à réaliser cet idéal, et le mérite amplement. Monsieur Métral, à travers votre oeuvre, vous portez haut les couleurs de ce Valais que vous aimez et qui, je crois, vous le rend. Grâce à vos talents de narrateur, nombreux sont les lecteurs qui, loin à la ronde, respirent et découvrent notre canton et - qui sait ? - en feront un jour le but d’un voyage. De fait, sans en porter le titre puisque les affaires étrangères sont domaine réservé de la Confédération, vous êtes l’un de nos meilleurs ambassadeurs ! Aussi, au nom du Conseil d’Etat, je tiens à vous adresser nos plus vifs remerciements, et nos sincères félicitations pour l’insigne distinction que vous obtenez aujourd’hui. « Le papier couvert d’écritures brûle mal », écrivait Boulgakov dans « Le Maître et Marguerite » : puisse Dieu vous donner encore l’inspiration, et le Valais la flamme intérieure, toutes deux nécessaires à votre écriture : la littérature française y gagne en diversité, le Valais en rayonnement ! Je vous remercie de votre attention. Jean-Jacques Rey-Bellet Président du Conseil d’Etat
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